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Les pays pauvres pourraient recevoir en tout jusqu’à 75 milliards de dollars de moins que prévu en matière de financements climatiques au cours des prochaines années. En effet, les nations riches devraient au total verser 68 à 75 milliards de dollars de moins d’ici à 2025 que la somme promise aux pays vulnérables pour aider ceux-ci à s’adapter aux effets de la crise climatique (100 milliards de dollars chaque année de 2020 à 2025), selon les estimations d’Oxfam rendues publiques aujourd’hui.

Cette analyse intervient alors qu’auront lieu aujourd’hui, lundi 20 septembre, les discussions informelles sur le climat entre les dirigeants du monde entier à l’Assemblée générale des Nations Unies – un moment clé pour corriger la trajectoire du financement climatique avant le sommet climatique des Nations Unies COP26 à Glasgow en novembre. L’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a publié vendredi de nouvelles données montrant que les pays développés n’ont fourni qu’environ 80 milliards de dollars en financements climatiques en 2019.

Sur la base des promesses et des plans actuels, Oxfam estime que les gouvernements riches ne rejoindront pas l’objectif de 100 milliards de dollars et n’atteindront que 93 à 95 milliards de dollars par an d’ici 2025. Cela signifie que les pays les plus vulnérables face à la crise climatique pourraient se voir privés de 68 à 75 milliards de dollars au total au cours de la période cible de six ans.

On estime que les températures extrêmement chaudes et froides tuent cinq millions de personnes chaque année (plus de 9% des décès humains dans le monde), et ce chiffre devrait augmenter en raison de la crise climatique. Celle-ci pourrait aussi entraîner des pertes économiques deux fois plus importantes que la pandémie, mais il n’est pas traité avec la même urgence. En 2020, l’Union Européenne, le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada, l’Australie et le Japon ont dépensé plus de 15 000 milliards de dollars en plans de relance budgétaire COVID-19, ce qui équivaut à atteindre 151 fois l’objectif de financement climatique. Dans le même temps, les dépenses militaires mondiales totales ont augmenté de 2,6 % depuis 2019 pour atteindre un peu moins de 2 000 milliards de dollars – soit près de 20 fois plus que l’objectif de financement climatique.

C’est dans ce contexte qu’Oxfam-Québec a lancé une pétition en faveur d’une relance économique verte, juste et inclusive ayant déjà recueilli plus de 25 000 signatures.

flècheJe signe la pétition

Le Canada a investi plus de 397 milliards de dollars canadiens dans les mesures d’intervention du COVID depuis janvier 2020, ce qui équivaut à plus de trois fois l’engagement mondial annuel en matière de financement climatique. En comparaison, le Canada s’est engagé à verser 5,3 milliards de dollars canadiens sur cinq ans en financement climatique pour aider les pays en développement à faire face au changement climatique et à soutenir une reprise verte. Bien que le Canada ait été l’un des rares pays à augmenter sa promesse au cours des derniers mois, le total des engagements financiers n’est toujours pas suffisant pour combler l’écart en matière de financement climatique, comme les dirigeants du G7 ont promis de le faire lors du sommet du G7 en juin.

À la demande du secrétariat de la COP26, le Canada a accepté de codiriger les travaux d’élaboration d’un plan d’action pour le financement du climat avant la COP 26 en novembre, qui permettrait aux pays développés de respecter leur engagement de 100 milliards de dollars par an jusqu’en 2025. Cependant, il reste à voir si le Canada respectera cet engagement.

Par ailleurs plusieurs pays, dont l’Italie, l’Espagne et les Pays-Bas, n’ont pas fait de nouvelles promesses lors du sommet de juin concernant leur financement climatique

Oxfam nourrit également de sérieuses inquiétudes quant à la manière dont les pays riches allouent actuellement leur financement climatique :

  • Sur la base des promesses existantes des pays donateurs, nous estimons que seulement un quart environ (26 à 27 milliards de dollars) du financement climatique total en 2025 sera consacré à aider les pays en développement à renforcer leur résilience et à s’adapter à l’aggravation des impacts climatiques. Le Secrétaire général de l’ONU, Oxfam et d’autres ont pourtant demandé que la moitié des sommes fournies soit consacrée à l’adaptation.
  • En 2019, 70 % des financements publics pour le climat ont été accordés sous forme de prêts plutôt que de subventions. Cette tendance semble vouloir se poursuivre jusqu’en 2025, ce qui poussera les pays les moins favorisés à s’endetter davantage.

Le financement climatique est l’un des trois piliers clés de l’Accord de Paris. Il est crucial pour les efforts mondiaux visant à lutter contre la crise climatique et ses effets. À l’échelle mondiale, l’année 2020 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée.

Pour les pays pauvres, la transition vers des énergies propres et l’adaptation aux effets des changements climatiques – dont certains sont déjà irréversibles – ne peuvent se faire sans ce soutien. Nombre de ces pays sont déjà contraints de consacrer des sommes importantes de leurs finances publiques à la lutte contre la crise climatique. Par exemple :

  • Les familles pauvres des zones rurales du Bangladesh dépensent près de 2 milliards de dollars par an pour prévenir les catastrophes liées au climat ou réparer les dommages causés par celles-ci, soit deux fois plus que le gouvernement et plus de 12 fois plus que ce que le Bangladesh reçoit dans le cadre du financement international multilatéral climatique. Une personne moyenne au Bangladesh produit 24 fois moins de CO2 qu’une personne moyenne aux États-Unis.
  • En raison de la hausse des températures, Madagascar connaît sa pire sécheresse depuis 40 ans. Plus d’un million de personnes dans la région Grand Sud sont en situation d’insécurité alimentaire. Madagascar a contribué à seulement 0,01 % de l’ensemble du dioxyde de carbone généré de 1933 à 2019.

« La pandémie a montré que les pays peuvent mobiliser rapidement des milliers de milliards de dollars pour répondre à une urgence. Or nous sommes dans une situation d’urgence climatique. Celle-ci fait des ravages dans le monde entier et exige la même détermination. »

Nafkote Dabi

Responsable de la politique climatique mondiale d'Oxfam International

« Les données indiquent clairement que les personnes les plus affectées par la crise climatique sont souvent celles qui en sont les moins responsables. Du Sénégal au Guatemala, des millions de personnes ont déjà perdu leur maison, leurs moyens de subsistance et des êtres chers à cause de tempêtes et de sécheresses chroniques provoquées par une crise climatique causée essentiellement par d’autres. Les personnes déjà en position de vulnérabilité, notamment les femmes et les jeunes, subissent démesurément les conséquences des changements climatiques. Les nations riches doivent tenir leur promesse et joindre le geste à la parole. Nous avons besoin d’une véritable augmentation des financements climatiques dès maintenant. »

Catherine Caron

Agente principale de campagnes chez Oxfam-Québec

À un peu plus d’un mois de la COP26 (la conférence des Nations unies sur le climat qui se tiendra à Glasgow) Oxfam-Québec et Oxfam canada appellent donc les pays riches à augmenter de toute urgence leurs promesses de financement pour atteindre leur objectif. Au moins 50 % du financement climatique devrait être consacré à l’adaptation.

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Camille Garnier
Agent des relations médiatiques et publiques
Cellulaire: 514 513-0506
Courriel: camille.garnier@oxfam.org

Notes :

  • La méthodologie et la fiche technique d’Oxfam sur le déficit de financement climatique sont disponibles sur demande.
  • En 2009, les pays développés ont accepté de contribuer à hauteur de 100 milliards de dollars par an au financement climatique des pays les plus pauvres d’ici 2020.
  • Lors du sommet climatique de Paris en 2015 (COP21), cet objectif a été prolongé jusqu’en 2025. Dans le cadre de l’accord de Paris de 2015, ils ont accepté de négocier un montant encore plus élevé qui entrerait en vigueur à partir de 2025.
  • La Semaine du climat de New York a lieu du 20 au 26 septembre. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, et le Premier ministre britannique, Boris Johnson, convoqueront une réunion à huis clos des dirigeants mondiaux à l’Assemblée générale de l’ONU plus tard dans la journée (lundi).
  • Une étude menée par l’université Monash et publiée dans The Lancet Planetary Health estime que plus de cinq millions de décès supplémentaires par an peuvent être attribués à des températures anormalement chaudes et froides. L’étude a révélé que les décès liés aux températures chaudes ont augmenté dans toutes les régions entre 2000 et 2019, ce qui indique que le réchauffement de la planète dû au changement climatique aggravera ce chiffre de mortalité à l’avenir.
  • Les économies des pays du G7 pourraient subir une perte moyenne de 8,5 % par an d’ici à 2050 – soit l’équivalent de 4,8 billions de dollars – si les dirigeants ne prennent pas les mesures qui s’imposent. Les économies des pays du G7 pourraient subir une perte moyenne de 8,5 % par an d’ici 2050, soit 4 800 milliards de dollars, si les dirigeants ne prennent pas des mesures plus ambitieuses pour lutter contre le changement climatique, selon l’analyse d’Oxfam des recherches menées par l’Institut Swiss Re.
  • Les bases de données du FMI sur le contrôle budgétaire récapitulent les principales mesures budgétaires annoncées ou prises par les gouvernements dans certaines économies en réponse à la COVID-19.
  • L’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) a indiqué que les dépenses militaires totales ont atteint 1 981 milliards de dollars en 2020 (près de 2 000 milliards de dollars ou 2 000 milliards de dollars), soit une augmentation de 2,6 % par rapport à 2019.
  • Le Climate Finance Shadow Report 2020 d’Oxfam estime que 80 % (47 milliards de dollars) de l’ensemble des financements publics pour le climat déclarés (2017-18) n’ont pas été fournis sous forme de subventions, mais principalement sous forme de prêts et d’autres instruments non subventionnés. Environ la moitié de cette somme (24 milliards de dollars) était non concessionnelle, offerte à des conditions peu généreuses exigeant des remboursements plus élevés de la part des pays pauvres. Oxfam a calculé que l'”équivalent-subvention” (la valeur réelle des prêts une fois les remboursements et les intérêts déduits) était inférieur à la moitié du montant déclaré.
  • Selon la NASA, 2020 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée à l’égal de 2016.
  • Hormis la pandémie de COVID-19, l’année 2020 a été dominée par les catastrophes liées au climat. Celles-ci ont été largement responsables des 389 événements enregistrés, qui ont entraîné 15 080 décès, 98,4 millions de personnes touchées et des pertes économiques d’au moins 171,3 milliards de dollars US, selon l’ONU.
  • L’IIED estime que les familles rurales du Bangladesh, dont beaucoup vivent dans la pauvreté, dépensent en moyenne près de 2 milliards de dollars par an (79 dollars par an et par ménage) pour faire face aux effets du changement climatique. Une personne moyenne au Bangladesh produit 0,66 tonne de dioxyde de carbone par an. Aux États-Unis, une personne moyenne produit 15,52 tonnes par an.
  • Selon le Programme alimentaire mondial des Nations unies, 1,14 million de personnes dans la région du Grand Sud de Madagascar ont besoin d’une aide d’urgence (IPC phase 3 ou supérieure). Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a récemment indiqué que Madagascar a connu une aridité accrue et que le changement climatique d’origine humaine est le principal facteur de l’augmentation de la température de surface en Afrique. Madagascar produit chaque année un peu plus de 0,01 % des émissions annuelles de dioxyde de carbone dans le monde, selon Our World in Data.
  • Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) estime que les coûts annuels d’adaptation dans les pays en développement devraient atteindre 140 à 300 milliards de dollars en 2030 et 280 à 500 milliards de dollars en 2050.
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