Israël n’a pas amélioré l’accès humanitaire dans la bande de Gaza depuis la décision de la Cour internationale de justice (CIJ) lui enjoignant de prendre des mesures immédiates afin de protéger la population civile de Gaza, selon une nouvelle enquête menée auprès de 35 organisations humanitaires.
Cette enquête, à laquelle ont participé des organisations telles qu’Oxfam, Médecins du Monde, Medical Aid for Palestinians, ActionAid, Islamic Relief et le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC), révèle qu’Israël a systématiquement refusé et restreint l’aide, les fournitures et les services humanitaires dans la bande de Gaza entre l’arrêt que la CIJ a rendu le 26 janvier 2024 et le cessez-le-feu entré en vigueur le 19 janvier 2025.
- 89 % des organisations ayant participé à l’enquête ont déclaré que les mesures prises par Israël concernant la fourniture de l’aide s’étaient durcies depuis la décision de la CIJ.
- 93 % de ces organisations ont déclaré que la situation humanitaire de la population qui reçoit leur aide et leurs services s’était détériorée.
- 100 % des organisations qui livrent des fournitures humanitaires à Gaza ont déclaré que les procédures israéliennes relatives à l’entrée de l’aide étaient soit inefficaces et avaient systématiquement entravé l’action humanitaire, soit insuffisantes pour répondre aux besoins de la population.
- 95 % des organisations qui livrent du matériel humanitaire à l’intérieur de la bande de Gaza ont déclaré avoir été régulièrement confrontées à des retards causés par la lenteur des procédures, certaines faisant état de délais de plus de deux mois.
Les organisations ont signalé que la livraison d’articles essentiels, tels que des bâches, du matériel de préparation aux conditions hivernales, des cuisines mobiles, des trousses d’hygiène, de la nourriture et du matériel pédagogique, avait été refusée sous le prétexte d’une « double utilisation » potentielle : Israël a en effet estimé que ces articles pouvaient éventuellement être utilisés à des fins militaires.
« Compte tenu du volume d’aide qui entre maintenant dans Gaza, on voit clairement à quel point Israël a entravé l’action humanitaire au cours des 15 derniers mois. Comme le montre l’enquête, Israël n’a absolument pas amélioré les conditions humanitaires dans la zone, au mépris du droit international, tout en empêchant systématiquement l’entrée d’une aide pourtant vitale. »
« Il est essentiel de faire le point sur les erreurs passées, même dans un contexte de cessez-le-feu. En l’absence de redevabilité et d’un engagement à protéger les opérations humanitaires, les mêmes cycles d’impunité et de négligence risquent de se répéter, laissant des millions de personnes sans espoir d’un avenir meilleur ».
L’infrastructure humanitaire détruite
Cette enquête, qui s’inscrit dans le cadre d’un bilan réalisé par ces ONG sur l’accès humanitaire, évalue le non-respect par Israël des mesures exigées par la CIJ concernant la fourniture d’aide humanitaire. Elle a révélé que la livraison de produits de première nécessité comme la nourriture, l’eau, le carburant, les abris et les installations sanitaires à Gaza se situait bien en deçà du minimum requis pour assurer la survie de la population, et que les politiques et les mesures israéliennes avaient provoqué le démantèlement de l’infrastructure et de l’environnement opérationnel des organisations humanitaires dans la bande de Gaza.
« Maintenant que l’aide arrive à Gaza, les prochaines semaines s’annoncent décisives mais difficiles, étant donné les ravages qu’Israël a provoqués à Gaza et l’élimination quasi totale de l’infrastructure humanitaire et de la capacité opérationnelle des organisations. »
L’enquête montre les conditions extrêmement pénibles dans lesquelles les équipes humanitaires ont travaillé à Gaza.
- 94 % des équipes humanitaires des organisations qui ont participé à l’enquête ont été déplacées au moins une fois – beaucoup d’entre elles plusieurs fois.
- 72 % des organisations humanitaires participantes ont déclaré que leurs locaux avaient été endommagés au moins une fois depuis le 26 janvier 2024 à cause des raids aériens ou terrestres des forces israéliennes, et nombre d’entre elles ont fait l’objet de plusieurs attaques. Au moins sept bureaux de ces organisations dans la ville de Gaza ont été lourdement endommagés, voire complètement détruits, tout comme plusieurs centres médicaux gérés par des ONG.
- 93 % des organisations humanitaires interrogées ont été contraintes de relocaliser leurs activités au moins une fois depuis la décision de la CIJ, principalement en raison des ordres de déplacement donnés par les forces israéliennes et à cause des offensives militaires. Presque toutes ont dû déménager plusieurs fois.
Le bilan dressé par ces organisations met également en évidence l’incapacité des États tiers à remplir pleinement leur obligation de prévenir des atrocités, y compris le risque de génocide. Il souligne que certains États continuent de fournir des armes et un soutien au gouvernement israélien, tout en s’abstenant de dénoncer les atteintes aux droits de la population palestinienne ou de prendre des mesures significatives pour les empêcher.
Les organisations demandent que l’aide humanitaire puisse continuer à être acheminée sans entrave et que la communauté internationale se penche d’urgence sur les atteintes au droit international perpétrées par Israël.
Notes aux journalistes
- L’enquête menée auprès des 35 organisations humanitaires est disponible ici en version anglaise (la version française sera disponible sous peu).
- Une année s’est écoulée depuis que la Cour internationale de justice (CIJ) a exigé qu’Israël prenne des mesures immédiates pour garantir la protection des droits de la population de Gaza contre les actes de génocide, et conclu qu’il existe un risque réel et imminent de préjudice irréparable à ces droits. Malgré cette directive juridique claire, au cours de l’année écoulée et jusqu’à l’accord de cessez-le-feu, aucune action significative n’a été observée pour remédier aux conditions humanitaires désastreuses de Gaza, ce qui a mené à une aggravation de la crise, en violation flagrante des mesures provisoires de la CIJ.
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