La reconnaissance de la Palestine doit s’accompagner d’actions concrètes : pour sauver des vies, les États doivent mettre fin aux crimes d’Israël et garantir l’autodétermination du peuple palestinien, plaident plus de 20 organisations indépendantes dans une déclaration commune.
La majorité des pays reconnaissent l’État de Palestine, mais les violations du droit international par Israël s’accélèrent, dans une impunité quasi totale, provoquant des déplacements massifs, des décès généralisés et une crise humanitaire de plus en plus grave dans l’ensemble du Territoire palestinien occupé. Pour un impact réel et afin d’éviter toute complicité, les États doivent transformer leurs expressions de solidarité en actions concrètes et salvatrices. Toute feuille de route future doit placer le peuple palestinien au centre, en tant que véritable architecte de son propre avenir.
La reconnaissance de l’État palestinien est une étape importante et bienvenue vers la réalisation du droit du peuple palestinien à l’autodétermination. Mais elle ne peut rester symbolique ni être traitée comme une récompense. Elle n’exonère pas les États membres de leurs obligations juridiques et morales de mettre fin à l’occupation israélienne du Territoire palestinien occupé (Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est) – une occupation que la Cour internationale de justice a jugée illégale en ce qu’elle constitue une violation du droit du peuple palestinien à l’autodétermination – et de faire cesser ce que la Commission d’enquête des Nations unies a qualifié de génocide perpétré par Israël à Gaza.
La crise humanitaire qui en résulte est largement documentée et bien connue. Au cours des deux dernières années, les ordres d’expulsion, les démolitions, les blocus, les arrestations arbitraires et les attaques directes menés par Israël ont entraîné le plus grand déplacement forcé en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, depuis le début de l’occupation en 1967. En 2024, le plus vaste accaparement de terres depuis trois décennies a été officiellement approuvé, et les violences commises par les colons ont atteint un niveau sans précédent. À Gaza, les autorités israéliennes mènent une opération militaire meurtrière qui a tué ou blessé plus de 136 000 personnes, forcé 2 millions de personnes à fuir à plusieurs reprises, et détruit 90 % des bâtiments. Partout à Gaza et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, les forces israéliennes ont attaqué près de 1 650 installations de santé. Elles ont restreint la liberté de circulation – par des postes de contrôle militaires, des portails, des barrières, des corridors et des zones interdites – avec des conséquences dévastatrices sur la capacité des communautés à accéder aux moyens de subsistance, aux soins de santé, à l’éducation et à d’autres services essentiels.
Les dirigeants mondiaux ne peuvent prétendre ignorer la situation. Même si quatre pays sur cinq dans le monde reconnaissent l’État de Palestine, le Parlement israélien a récemment approuvé une motion visant à annexer complètement la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, où vivent 3,3 millions de Palestiniens. Des responsables israéliens ont réaffirmé leur volonté d’exercer une « souveraineté complète » sur la Cisjordanie, déclarant qu’« il n’existe pas de peuple palestinien ni d’État palestinien », et que « cette terre appartient aux Israéliens ». Des intentions similaires ont été clairement exprimées pour l’ensemble de Gaza.
Ces déclarations ne sont plus marginales : elles révèlent ce qui motive l’effacement accéléré d’un peuple. La fragmentation et l’annexion par Israël de terres reconnues internationalement comme palestiniennes rendent la perspective d’un État palestinien viable de moins en moins réaliste.
Agir n’est pas une option. En juillet 2024, la Cour internationale de justice a précisé que tous les États membres de l’ONU sont tenus de ne pas reconnaître ni soutenir l’occupation illégale d’Israël, y compris par le commerce et les investissements. Par ailleurs, la Commission d’enquête des Nations unies a conclu que tous les États doivent « prendre toutes les mesures nécessaires pour tenter d’éviter ou d’arrêter la commission d’un génocide ».
Au cours des quelques semaines écoulées depuis que plusieurs pays supplémentaires ont reconnu l’État de Palestine, des centaines de Palestiniennes et de Palestiniens ont été tués et plus de 1 500 blessés par des tirs israéliens dans l’ensemble du Territoire palestinien occupé. La prise militaire de la ville de Gaza s’est intensifiée dans son ampleur et sa brutalité : des frappes meurtrières contre des tentes, des logements et des bâtiments publics ont contraint des dizaines de milliers de personnes à fuir à nouveau, alors que la majorité n’a nulle part où aller. Plusieurs établissements de santé dans le nord ont dû fermer, laissant des centaines de milliers de personnes avec un accès extrêmement limité aux soins médicaux. En Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, les attaques de colons, les incursions militaires et les arrestations se sont intensifiées. Des dizaines de structures palestiniennes ont été démolies. La Commission de la sécurité nationale du Parlement israélien a fait avancer les discussions visant à restreindre l’accès humanitaire aux prisons, où sont détenus plus de 9 500 Palestiniens et Palestiniennes, ainsi qu’un projet de loi autorisant la peine de mort pour les personnes détenues.
Chaque heure de retard signifie une famille brisée de plus, un enfant affamé de plus, une maison réduite en poussière de plus, un autre pan de la vie palestinienne effacé.
Pour éviter un scénario où il ne resterait qu’un État palestinien sans le peuple palestinien, et pour empêcher les forces israéliennes et les colons d’imposer de nouvelles représailles aux communautés, les États doivent mobiliser tous les outils politiques, économiques et juridiques à leur disposition pour :
- Un cessez-le-feu immédiat et permanent à Gaza, permettant au peuple palestinien de concevoir et diriger lui-même ses projets et processus de (re)construction, conformément à son droit inaliénable à l’autodétermination ;
- La fin de l’occupation illégale par Israël de l’ensemble du Territoire palestinien occupé, afin de garantir les conditions nécessaires au maintien du peuple palestinien sur ses terres ;
- Un accès humanitaire sans restriction, coordonné par l’ONU et protégé conformément au droit international humanitaire, dans tout le Territoire palestinien occupé ;
- La fin du commerce avec les colonies illégales, y compris la fourniture de services et les investissements ;
- L’arrêt immédiat de toutes les ventes et de tous les transferts d’armes vers Israël ;
- La responsabilisation pour les crimes commis ;
- La réouverture immédiate d’un corridor entre Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, pour les évacuations médicales et autres besoins humanitaires.
Les signataires (en ordre alphabétique) :
- ActionAid International
- Al Awda Health and Community Association
- American Friends Service Committee (AFSC)
- Arab Educational Institute – Pax Christi Palestine
- Bystanders No More
- Churches for Middle East Peace (CMEP)
- CIDSE – International Family of Catholic Social Justice Organisations
- Emmaus International
- Global Centre for the Responsibility to Protect
- Global Legal Action Network (GLAN)
- HelpAge International
- Insecurity Insight
- Médecins du Monde International Network (MdM)
- Norwegian People’s Aid
- Oxfam International
- PARC – Agricultural Development Association
- Pax Christi International
- Palestinian Institute for Climate Strategy (PICS)
- Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
- Sabeel-Kairos UK
- The Middle East Children’s Alliance
- Terre des Hommes Italy
- United Against Inhumanity
Notes aux journalistes
- En 2025, les politiques et pratiques israéliennes ont forcé au moins 40 000 Palestiniens et Palestiniennes à quitter leur domicile dans le nord de la Cisjordanie — un record depuis le début de l’occupation israélienne en 1967 — en raison de démolitions ordonnées par Israël, d’expulsions et de l’intensification des attaques menées par des colons et les forces armées. Au moins 66 800 autres personnes sont directement menacées de transfert forcé, environ 663 km² de terres étant vulnérables à la colonisation ou à l’expansion des colonies.
- En juillet 2024, les autorités israéliennes ont approuvé le plus vaste vol de terres en Cisjordanie depuis trois décennies, ainsi que la construction de plus de 15 000 unités de logement et de 22 nouvelles colonies illégales rien qu’en 2025, et l’établissement de plus de 121 nouveaux avant-postes. Il y a quelques semaines, les autorités israéliennes ont donné leur approbation finale au projet de colonie « E1 », qui isole de facto Jérusalem-Est de la Cisjordanie occupée, fragmentant davantage le territoire.
- Depuis deux ans, les forces israéliennes bombardent Gaza sans relâche. L’opération militaire a tué au moins 66 000 personnes, blessé 170 000 autres, et forcé près de 2 millions de personnes à fuir à plusieurs reprises. Plus de 92 % des unités d’habitation et 90 % des bâtiments scolaires sont désormais détruits, et seulement 1,5 % des terres agricoles sont encore utilisables.
- Depuis 2007, les autorités israéliennes bloquent l’entrée de biens essentiels à Gaza, y compris un siège total de 11 semaines plus tôt cette année, qui a provoqué une famine extrême, confirmée dans le nord de Gaza, ainsi que des pénuries critiques dans les infrastructures de santé.
- Depuis octobre 2023, les forces israéliennes ont attaqué près de 1 650 établissements de santé à travers l’ensemble du Territoire palestinien occupé.
- Les autorités israéliennes ont imposé d’innombrables restrictions à la liberté de circulation dans tout le Territoire palestinien occupé, notamment sous la forme de corridors militarisés, de postes de contrôle et de zones interdites à Gaza (82 % du territoire est désormais inaccessible), et de plus de 800 portails, checkpoints et barrières en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, avec des conséquences dévastatrices sur la capacité des populations à accéder à leurs moyens de subsistance, aux soins de santé, à l’éducation et à d’autres services vitaux.
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