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Montréal, 11 avril 2019 : Oxfam-Québec demande à la Banque mondiale de cesser de soutenir la privatisation de l’enseignement de base dans les pays à faible revenu, au vu des preuves de plus en plus nombreuses qui indiquent que cette approche ostracise les enfants plus pauvres, particulièrement les filles, sans améliorer la qualité de l’éducation.

En effet, le nouveau rapport d’Oxfam « False Promises », publié avant les Réunions de printemps de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), indique que la Banque doit immédiatement cesser de faire la promotion des partenariats publics-privés (PPP) qui favorisent l’enseignement privé.

Oxfam a analysé le portefeuille de l’enseignement primaire et secondaire de la Banque de 2013 à 2018 et a découvert que plus d’un cinquième des projets comptaient du financement aux gouvernements pour l’enseignement privé. De 2014 à 2018, 20 des 94 projets appuyaient la provision au privé, comparativement à 10 sur 59 de 2008 à 2012. 

Le nombre de pays accueillant ces projets a presque doublé, passant de 7 à 13.  De plus, une étude indépendante de 2017 menée par RESULTS a conclu que la filiale privée de la Banque, la Société financière internationale, a quadruplé son financement pour les écoles privées à but lucratif depuis 2006.

En outre, la Banque conseille activement aux gouvernements d’investir dans les partenariats public-privé (PPP) à l’aide de son programme SABER (Systems Approach for Better Education Results). Par exemple, elle suggère aux pays de fournir des fonds de démarrage et des terrains publics pour l’établissement d’écoles privées, d’assouplir les règles et d’accroître l’enseignement à but lucratif.

Jusqu’à maintenant, rien ne prouve que les écoles en PPP aient un meilleur rendement que les écoles publiques. Dans des pays comme l’Ouganda, on a reproché à ces écoles d’avoir embauché des enseignants sous-qualifiés et d’avoir généré de piètres résultats.

Oxfam affirme être particulièrement inquiète à propos des PPP qui font la promotion des écoles à faible coût et à but lucratif, car elles excluent démesurément les filles et les enfants plus pauvres, et offrent souvent des salaires de misère à des enseignants peu qualifiés. En Ouganda et au Kenya, on a accusé les écoles commerciales de refuser de se conformer aux normes gouvernementales minimales en matière d’éducation.

L’éducation publique : le moyen d’assurer l’égalité des chances

« Oxfam-Québec défend l’éducation publique pour toutes et tous, qui représente le meilleur moyen d’assurer aux enfants, quel que soit leur genre ou leur milieu socioéconomique, des chances égales de réussite, indique la directrice d’Oxfam-Québec, Denise Byrnes. Les financements de plus en plus importants et la promotion que la Banque mondiale accorde à l’éducation privée dans l’ensemble des pays à faible revenu nous semblent à ce titre aller à l’encontre de notre combat pour une société plus équitable et inclusive. »

Pendant ce temps, des pays à faible revenu dépensent moins de la moitié du minimum recommandé par l’UNESCO, soit 197 $ par élève, nécessaire pour offrir un enseignement primaire adéquat.

« Le fait que la Banque encourage la privatisation de l’enseignement comme solution pour améliorer les résultats en éducation pour tous nous inquiète profondément, car elle n’y parvient tout simplement pas, explique la chef du bureau d’Oxfam International à Washington DC, Nadia Daar. Au lieu de ça, il y a de plus en plus de preuves que ces PPP créent un système d’éducation très inégal et segmenté duquel trop d’enfants sont exclus puisqu’ils ne peuvent payer les coûts élevés ou satisfaire aux exigences d’admission. »

La Banque mondiale est le plus important bailleur de fonds externe au monde pour l’éducation et soutient principalement l’enseignement public. Elle a souligné l’importance d’investir dans la santé et l’éducation grâce à son Projet sur le capital humain.

« Cet outil, qui est l’un des plus puissants pour contrer la pauvreté et les inégalités devrait être employé pour soutenir un investissement majeur dans l’éducation publique gratuite, universelle et de qualité, affirme Denise Byrnes. Il est urgent que la Banque mondiale agisse en faveur d’investissements adéquats dans les systèmes d’éducation publique où les classes du primaire peuvent compter jusqu’à 80 élèves par enseignant dans certains pays.  »

« L’argent est là, mais nous avons besoin de volonté politique, ajoute Katie Malouf Bous, auteure du rapport et conseillère principale des services publics à Oxfam. Des réformes fiscales intérieures et internationales doivent être adoptées. Les donateurs doivent mettre pleinement en œuvre leurs engagements d’aide. De plus, il est nécessaire de restructurer la dette de façon équitable, car celle-ci asphyxie l’espace budgétaire de nombreux pays à faible revenu et leur capacité de payer pour des services publics essentiels. Nous espérons que le nouveau président, David Malpass, défendra ces enjeux ainsi que d’autres questions pressantes, comme l’urgence climatique. »

Oxfam fait remarquer que même si les projets de la Banque mondiale soutenant la provision au privé ne sont pas tous nuisibles, bon nombre d’entre eux financent un modèle qui accroît l’enseignement privé au lieu de l’accès à une éducation publique de qualité en tant que droit de la personne.

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