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Montréal, 2 décembre 2019 – À l’occasion de la première journée de débats de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP25), qui se tient à Madrid jusqu’au 13 décembre, Oxfam dévoile les résultats d’un rapport alarmant sur la hausse des déplacements forcés de populations depuis 10 ans et son impact sur les pays les plus pauvres du globe.

Oxfam montre en effet que les catastrophes imputables aux changements climatiques ont été le principal facteur de déplacements internes au cours de la dernière décennie, forçant quelque 20 millions de personnes par an à quitter leur foyer. La question délicate de l’aide financière à apporter aux communautés, y compris aux populations déplacées, ayant subi des pertes et dégâts irréversibles à cause de la crise climatique devrait être au cœur des débats de la COP25, soutient Oxfam.

Au Bénin, Oxfam-Québec étudie d’ores et déjà différents scénarios de solutions agro-écologiques d’adaptation aux changements climatiques à l’intention de 206 familles. Ce pays d’Afrique de l’Ouest est d’ailleurs classé au 8e rang des pays où la population est la plus exposée au risque de déplacement imputable à un conflit et à des phénomènes climatiques extrêmes.

 « Nous appuyons certes un projet d’adaptation aux changements climatiques au Bénin, mais il est clair que des mesures globales et vigoureuses devront être prises par la communauté internationale pour soutenir de manière récurrente les pays les plus à risque de subir les contrecoups des émissions de gaz à effet de serre des pays riches, comme le Canada, soutient Anne Duhamel, directrice des politiques et campagnes chez Oxfam-Québec. Il est de notre devoir de nous responsabiliser par rapport à la crise climatique, qui devrait être notre priorité, pour notre avenir à toutes et à tous, conclut-elle.

« Présentement, sur le terrain, nous notons une complexification de l’aide humanitaire apportée en situation d’urgence, constate Céline Furi, coordonnatrice humanitaire chez Oxfam-Québec. Dans certaines régions affligées par des conflits armés, comme au Yémen, les populations sont déjà lourdement affectées par la destruction des infrastructures, qui rend quasi impossible l’accès à l’eau potable par exemple. Si on ajoute à cela des sécheresses ou des inondations, ce sont les récoltes qui sont détruites. On vient décupler l’impact des crises sur les gens et retarder leur retour à une vie normale, explique-t-elle.

Des impacts inégaux sur les pays pauvres

Le rapport d’Oxfam intitulé « Populations contraintes de fuir » révèle que le risque de déplacements internes après un cyclone, une inondation ou un incendie est sept fois plus élevé qu’en cas de séisme ou d’éruption volcanique, et trois fois plus élevé qu’en situation de conflit.

Personne n’est à l’abri, comme en témoignent les incendies en Australie ou, plus près de chez nous, les inondations du printemps dernier au Québec, qui ont provoqué l’évacuation de centaines de personnes, notamment à Sainte-Marthe-sur-le-Lac, dans la région des Laurentides. Toutefois, l’analyse d’Oxfam indique que ce sont les populations des pays pauvres, pourtant très peu responsables des émissions mondiales, qui sont les plus exposées.

En effet, sept des dix pays les plus exposés à des déplacements internes causés par des phénomènes climatiques extrêmes sont de petits États insulaires en développement. À Cuba, la Dominique et Tuvalu, entre 2008 et 2018, près de 5 % de la population a dû fuir chaque année à cause de conditions climatiques extrêmes. C’est comme si la population de l’île de Montréal, de Laval et de Québec avait été contrainte de se déplacer ailleurs au Québec chaque année. Pourtant, les petits États insulaires en développement génèrent environ trois fois moins d’émissions par habitant que les pays à revenu élevé.

Les impacts inégaux de la crise climatique sont visibles à l’échelle mondiale. Les habitantes et habitants des pays à revenus faible et intermédiaire ont 4 fois plus de risque d’être déplacés en raison de catastrophes climatiques extrêmes que les populations des pays à revenu élevé comme les États-Unis. Par exemple, le cyclone Idai, qui a frappé le Mozambique, le Malawi et le Zimbabwe en mars 2019, a provoqué le déplacement de 200 000 personnes. Les communautés les plus durement touchées vivaient en milieu rural, où les habitations et le réseau routier rudimentaires n’ont pas résisté aux pluies abondantes et aux vents forts.

 Un plaidoyer en faveur d’un nouveau fonds de reconstruction

L’ONU présentera à Madrid ses conclusions sur les progrès effectués dans le cadre du Mécanisme international de Varsovie relatif aux pertes et aux préjudices. Les pays en développement plaideront aussi pour la mise en place d’un nouveau fonds qui devrait aider les communautés touchées à se relever et à se reconstruire à la suite de catastrophes climatiques.

Les pays riches ont largement laissé les pays pauvres assumer eux-mêmes les coûts croissants des catastrophes climatiques extrêmes. Oxfam montre qu’en moyenne, les pertes économiques inhérentes à des phénomènes climatiques extrêmes au cours de la dernière décennie sont équivalentes à 2 % du PIB des pays concernés. Ce chiffre est beaucoup plus élevé pour de nombreux pays en développement; il atteint même les 20 % dans les petits États insulaires.

« Partout dans le monde, même ici au Québec, les gens descendent dans la rue pour exiger des mesures urgentes en faveur du climat. Si les leaders politiques ne répondent pas à ces appels, davantage de personnes devront faire face à des conséquences dramatiques et seront contraintes de quitter leur foyer », affirme madame Duhamel, d’Oxfam-Québec

« Les gouvernements peuvent et doivent accorder toute l’importance nécessaire au Sommet de Madrid. Ils doivent s’engager sur une réduction plus rapide et plus ambitieuse des émissions de gaz à effet de serre ainsi que mettre en place un nouveau fonds pour aider les communautés pauvres à se reconstruire après des catastrophes climatiques », ajoute-t-elle.

La sécurité des femmes et des filles mise à mal

Les femmes et les filles qui sont contraintes de quitter leur foyer sont particulièrement éprouvées, car elles doivent souvent chercher des ressources pour la survie de leur famille dans des contextes où la perturbation du tissu social, la précarité matérielle et l’incertitude favorisent les violences et les abus.

« Nous travaillons avec une préoccupation constante pour la sécurité et la dignité des femmes et des filles qui sont déplacées. Dans les sites qui les accueillent par exemple, nous construisons des latrines séparées pour les femmes afin de leur assurer un minimum d’intimité et de limiter les risques de violence, raconte Céline Furi, d’Oxfam-Québec. Mais il est clair que les fonds dont nous disposons ne sont pas suffisants pour répondre à des besoins croissants, ajoute-t-elle. Oxfam-Québec compte aussi sur la générosité du grand public pour augmenter sa capacité d’intervention. »


Notes aux rédactions

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