22 mars 2021 – Alors que cette semaine marque les six ans du conflit au Yémen, une deuxième vague de Covid-19 est en cours dans le pays, avertit Oxfam aujourd’hui. Les cas enregistrés ont été multipliés par 22 ces dernières semaines. Cette situation survient à un moment où l’on craint que la reprise des combats ne force des centaines de milliers de personnes à fuir pour se mettre en sécurité.
Les Nations unies ont déjà prévenu que le Yémen était confronté à la pire famine que le monde ait connue depuis des décennies, alors que des combats intenses se déroulent dans le gouvernorat de Marib (ouest du pays) et que l’on redoute que près de 400 000 personnes ne soient obligées de fuir. Oxfam craint que ces déplacements forcés de population accélèrent la propagation du virus. L’arrivée de la saison des pluies (attendue en mai) devrait aussi faire resurgir le choléra, qui, combiné à la pandémie, menace de submerger le système de santé déjà en état critique et amputé de moitié par six ans de guerre (700 lits de soins intensifs et 500 ventilateurs pour une population de 30 millions d’habitants).
« Les habitants de Marib sont désespérés, ils doivent choisir entre rester sur place au péril de leur vie et de celle de leurs enfants ou fuir dans le désert où il n’y a ni eau ni nourriture, indique Muhsin Siddiquey, directeur national d’Oxfam au Yémen. Dans les villes du pays, les gens vivent une intensification des combats. J’entends des rapports terribles d’enfants tués, de maisons dans des quartiers résidentiels frappées et de personnes obligées de tout quitter pour se sauver ».
Plus de 4 millions de personnes ont jusqu’à présent été déplacées par le conflit et près de 68 % des Yéménites ont besoin d’une aide humanitaire. L’ONU estime que 1,2 million de personnes ont fui vers Marib, qui était jusqu’à récemment considérée comme relativement sûre et qui accueille la plus grande population de déplacés internes du Yémen.
Malgré l’ampleur des besoins, le programme d’aide du Yémen est sous-financé à plus de 50 %. Au début du mois, l’ONU a organisé une conférence de donateurs demandant 3,85 milliards de dollars, mais a reçu moins de 1,7 milliard de dollars, moins que ce qui a été reçu en 2020 et 1 milliard de dollars de moins que le montant promis lors de la conférence de 2019.
À ce titre et malgré l’annonce récente de l’octroi de 69,9 millions de dollars, la contribution du Canada reste largement en deçà du rôle de leader international de la solidarité que celui-ci entend assumer. C’est d’autant plus vrai que le gouvernement canadien refuse toujours de suspendre ses exportations de matériel militaire vers l’Arabie saoudite, l’une des parties au conflit, et ce malgré les appels répétés de nombreuses organisations dont Oxfam-Québec. Une pétition lancée par Oxfam-Québec réclamant au Canada de mettre fin à ces exportations a d’ailleurs recueilli près de 3000 signatures au Québec.
« Le Canada a la responsabilité morale et politique de faire davantage pour ce qui constitue l’une des pires crises humanitaires au monde, affirme Céline Füri, coordonnatrice humanitaire d’Oxfam-Québec. D’autres pays au PIB similaires ont d’ailleurs offert un soutien bien plus conséquent. Les Yéménites ont un besoin urgent d’aide mais ils ont également besoin de toute urgence d’un cessez-le-feu immédiat et d’une fin des hostilités négociée avec succès afin que les familles puissent se concentrer sur l’avenir plutôt que sur leur survie quotidienne. »
Les chiffres officiels font état de 3 418 cas et 751 décès dus à la COVID au Yémen, soit un taux de mortalité de près de 22 %, l’un des plus élevés au monde. Mais comme les tests sont rares et que de nombreux cas de maladie et de décès ont été signalés, le nombre réel de décès liés à la COVID-19 est sans doute beaucoup plus élevé.
Personne au Yémen n’a été vacciné contre la COVID, bien que le pays s’attende à recevoir des vaccins dans le courant du mois. Le pays est aux prises avec le choléra depuis le début de la pire épidémie au monde, il y a cinq ans, avec plus de deux millions de cas signalés.
Je soutiens la réponse humanitaire d’Oxfam au Yémen- L’escalade internationale du conflit au Yémen a eu lieu le 26 mars 2015.
- Les études de cas de Marib sont disponibles sur demande.
- Un aperçu récent des besoins humanitaires au Yémen est disponible sur le site du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU
- Les données sur la COVID-19 au Yémen sont disponibles sur le site du Centre de ressources sur le coronavirus (CRC) et les données sur la distribution des vaccins contre la COVID-19 sont extraites du site Bloomberg
- Les chiffres sur les déplacements à Hodeïda en 2018 sont issues de l’Organisation internationale des migrations de l’ONU ainsi que les données récentes sur les déplacements
- Les responsables locaux estiment à 3 millions le nombre de personnes déplacées à Marib.
- Entre avril 2017 et décembre 2018, il y a eu plus de 1,3 million de cas suspects de choléra et 2 760 décès associés dans le pays – l’une des pires épidémies de l’histoire récente (UN YHNO – décembre 2018).
- L’Organisation mondiale de la santé a signalé une augmentation des cas suspects de choléra en 2019, avec plus de 861 000 cas suspects et 1025 décès associés enregistrés. Entre le 1er janvier et le 30 juin 2020, 150 849 cas suspects ont été enregistrés.